Au fil de mes pérégrinations sur la blogosphère, j'avais noté sur ma LAL plusieurs titres de l'auteur, notamment L'annulaire que j'étais bien décidée à lire pour ce rendez-vous. Et puis le hasard en a décidé autrement : au moment de passer ma commande, j'ai lu plusieurs résumés des oeuvres de Yôko Ogawa, et celui-ci s'est imposé à moi comme une évidence... Il faut croire que le hasard fait bien les choses!
L'histoire :
Mari travaille avec sa mère dans l'hôtel familial situé dans une station balnéaire. Un soir, un scandale éclate, réveillant toute la clientèle de l'hôtel. Une femme qui semble être une prostituée sort d'une chambre à moitié dévêtue en hurlant et en insultant l'homme qui s'y trouve de pervers. Lorsque l'homme sort de la chambre, Mari qui a assisté à toute la scène est fascinée : cet homme est un vieillard et il inspire le respect. Lorsqu'elle le croise deux semaines plus tard chez un marchand, elle se met à le suivre sans pouvoir se l'expliquer. L'homme l'a reconnue et engage la conversation. Rapidement, leur relation évolue : Mari qui n'a que dix-sept ans doit ruser pour pouvoir quitter l'hôtel et rejoindre celui qu'elle appelle le traducteur pour de longues balades en ville. Entre chaque rencontre, ils entretiennent une correspondance. Puis un jour, elle accepte de le suivre chez lui, là-bas sur l'île, et là tout bascule... L'homme se révèle adepte des relations sado-masochistes, et si Mari éprouve quelques réticences au début, elle se laisse très vite convaincre et semble y trouver elle-aussi du plaisir...
C'est particulier, très particulier, mais j'ai vraiment adoré ce roman. Yôko Ogawa crée un univers très étrange dans ce roman, un univers que l'on peut qualifier de malsain, notamment parce qu'elle met en scène la relation entre une jeune fille et un vieillard. Et comme si cela ne suffisait pas, ce dernier est un pervers qui n'hésite pas à lui faire subir quelques sévices... Alors bien sûr, ce que l'on ressent à la lecture est assez étrange, entre dégoût et fascination. Mais finalement, même si l'homme ne lui laisse pas vraiment le choix la première fois, Mari se prend au jeu et en redemande. Et comme c'est elle la narratrice, le lecteur se veut complice pour ne pas dire voyeur. Mari doit inventer des mensonges pour échapper à sa mère, et je dois reconnaître que comme cette dernière n'est pas des plus sympathiques, j'ai pris plaisir à la voir se faire berner. Il n'y a que la femme de ménage de l'hôtel qui semble avoir vu clair dans le petit jeu de Mari... Encore un personnage qui ne manque pas de piquant! Tous semblent avoir une déviance, une perversité... D'ailleurs, j'ai été assez surprise par cette lecture qui remet en question les préjugés que j'avais sur la littérature asiatique. J'en avais une image plutôt sage, une littérature toute en pudeur, presque "coincée" mais ce n'est pas le cas du tout, même si j'ai pu lire qu'Hôtel Iris était considéré comme le plus extrême des romans de l'auteur.
Extrême en effet pour la violence qui s'en dégage et pourtant, à aucun moment, je n'ai trouvé ça vraiment insupportable, parce que par contraste, l'écriture de Yôko Ogawa se veut douce, délicate. On se laisse porter par ses mots, par la simplicité de ses phrases. Les propos presque enfantins de la narratrice viennent adoucir le tout dans un formidable paradoxe. Un paradoxe qui se retrouve au niveau de la lecture : on a envie de condamner cette relation, on éprouve un malaise certain, et pourtant, il est impossible de lâcher ce livre avant de l'avoir fini, et même fini, on n'a qu'une hâte : se plonger dans le prochain Ogawa. Soyez-en certains, je lirai d'autres titres de l'auteur et je compte bien sur vos différents billets pour m'aider à choisir le prochain!